« L’ennemi allemand ». Ressenti, en 7 mots, la tragique vérité sur Merkel
« Comptez, saluez et poursuivons Gualtieri. » Borghi, une « assistance » sensationnelle au premier ministre: de sales coups sur le Mes?
Règle numéro un: ne faites jamais confiance aux Allemands même lorsqu’ils apportent des cadeaux, et encore moins s’ils se limitent à une solidarité velue et stéréotypée comme celle exprimée hier par la Bild Zeitung qui nous a consacré une de ses pages jamais trop bienveillantes. Titre en majuscule: «WIR SIND BEI EUCH!» ou «Nous sommes avec vous!»; avec nous comme « le pays le plus touché par le coronavirus », comme le souligne l’image d’une infirmière gracieuse avec un masque de commande photographié entre les drapeaux italien et germanique. Conduisez, en un mot: à notre manière, nous vous aimons et nous savons que vous allez gérer; donc: partez avec!
A la lettre, en effet, le journal allemand se répand en certificats d’estime et d’amitié, même s’ils sont adoucis: «Nous sommes proches de vous en ce moment de douleur car nous sommes comme des frères que nous vous voyons combattre, nous vous voyons souffrir Vous êtes toujours dans nos pensées. Tu vas le faire. Parce que tu es fort. La force de l’Italie est de donner de l’amour aux autres ». Et jusqu’à présent, nous sommes proches du minimum syndical qui est dû aux malheureux cousins dans une relation de bon eurovicinato. Mais la période de la Bild est toujours entrecoupée d’une théorie des lieux communs comparables aux mouvements littéraires de notre Pier Vittorio Tondelli sur le métallurgiste bavarois qui quitte le littoral romagnon trempé dans de la bière et gainé de sandales avec une pédale d’éponge blanche.
Dans ce cas, des banalités supportables alternent, des choses comme «vous nous avez aidés à remettre notre économie sur les rails» ou «vous nous avez apporté de bonnes choses à manger»; avec une évidence qui monte dans un crescendo rhétorique d’une caserne teutonique romantique: «Soudain, il y a eu des apéritifs, des papillons, du tiramisu aussi. Plus seulement de la choucroute et des pommes de terre et du pain de viande Nous sommes venus vous rendre visite avec le scarabée, sur la Riviera, à Rimini, puis à Capri, Venise et en Toscane. Nous cherchions la mer bleue et le parfum des citrons, fredonnant Umberto Tozzi et Paolo Conte. ».
LES FILS DE LA SAUVEGARDE
Nous voici donc: une carte postale sentimentale, gratuite et involontairement ironique, digne des croquis dérisoires (en jargon: « meme ») mis en ligne par nos compatriotes en réponse aux « frères allemands » ingrats, si séduits qu’ils seraient les enfants du même sauveteur de Rimini, protagoniste inattendu de l’une de ces vacances côtières inoubliables. Ce qui est encore moins surprenant, cependant, c’est la grande fin de l’article: «Salut l’Italie, nous nous reverrons bientôt, en buvant un café ou un verre de vin rouge. En vacances ou dans une pizzeria ». Pas de mention de toute forme de collaboration active (nette d’une niche de soins intensifs trouvée pour les Italiens intubés en excès); pas une demi-promesse de rembourser la contribution italienne au redémarrage de l’économie de l’Allemagne, qui après 1945 s’est vu pardonner au moins la moitié des dettes de guerre (il en a été de même pour la réunification de la nation après l’effondrement du mur communiste). Pas même une vague allusion à l’opportunité, sinon à la commodité commune, de mutualiser une partie de la dette souveraine qui est émise à travers l’Europe contre l’urgence sanitaire atroce.
Mais malheur à nous surprendre: nous savons comment les Allemands ont été faits au moins depuis le début du XXe siècle de Weimar qui a servi d’incubateur pour le national-socialisme d’Hitler. Berlin redoute davantage l’inflation de la peste et dans le vocabulaire allemand le mot « dette », « Schuld », a une connotation morale marquée équivalente au concept de « culpabilité ». Protestant par intermittence, les amis germaniques ont remplacé le « sinca fortiter » luthérien par le pilori pointu et punitif de la Commission qu’ils contrôlent. Ils sont incontestablement la locomotive principale du Vieux continent, et pourtant ils se présentent comme des fourmis industrieuses aussi parce que la monnaie unique a laissé le pouvoir du Marco inchangé dans leur faible balance commerciale qui marque chaque année des actifs totalement surdimensionnés par rapport aux toits européens. De plus, avec une raison dilatée à l’extrême, nous, les Italiens, insistons pour dessiner comme les cigales de la Méditerranée qui s’endettent avec les Grecs et les Espagnols dans une course à ceux qui crachent le mieux l’argent des générations futures.
« Coccinelle et vin rouge: les frères italiens guéris, à bientôt dans une pizzeria ». Hypocrisie allemande: l’article honteux de Bild
Mais si face à leur énième profession de proximité, notre première réaction est toujours la même – où sera la sola? – avec le recul il n’est pas impossible de saisir quelque chose d’encourageant même dans l’éjaculation de Bild sur la pizza et sur la mandoline affligée par la pandémie. De quoi parle-t-on? En trois mots: peur et nécessité. Même en Allemagne, le sombre courage des obtus ne fait que masquer l’art de ne pas admettre à qui que ce soit, sinon à eux-mêmes, une terreur endogène croissante.
LA TERREUR DES MOTIFS
Et les Allemands ont précisément peur: ils savent qu’en termes de contagions et de mourants, ils sont, comme le reste du continent, une espèce d’Italie qui a deux semaines de retard. Proclamer des amis de Rome signifie aussi se tapoter le dos, exorciser le spectre de l’avenir en embuscade, espérer que les terroni de l’Europe ressortent bien pour démontrer que le même cours peut avoir lieu dans des pays plus développés avec des systèmes de santé moins boiteux.
Enfin, il y a le besoin, ce que les psychanalystes jungiens appellent la « cause erratique »: un destin imminent auquel personne ne peut échapper. En bref: si l’Italie descend, tôt ou tard, elle entraînera tous ses partenaires dans un abîme sans fond. Dans cette perspective, une solidarité libre dans la presse pourrait même être le prologue d’une reddition au bon sens des Coronabonds, presque un carottage dans l’opinion publique allemande en vue de l’ouverture d’une ligne de crédit qui éloignera du métallurgiste bavarois un part de sa puissante richesse. Au plaisir de revenir en vacances sur la Riviera romagnole, pour retrouver un jour nos enfants et frères du même été.
